Santé et biodiversité

infirmière santé
infirmière santé

Santé et biodiversité

Quels liens entre santé et biodiversité ?

Mise à jour 07 décembre 2022

D’après l’article 1er de la Charte de l’environnement (2004) annexée à la Constitution française, « Chacun a le droit de vivre dans un environnement équilibré et respectueux de la santé ». Un environnement sain, des écosystèmes non dégradés et fonctionnels sont une condition du maintien d’une santé humaine durable. La biodiversité est en effet à la base de nombreux services nécessaires à notre existence et constitue souvent une protection pour la santé humaine. Elle peut aussi être source de perturbations, en particulier lorsque ses équilibres sont fragilisés. La perte de biodiversité peut ainsi avoir des conséquences néfastes et directes sur la santé ; par exemple en perturbant les fonctionnalités des écosystèmes, elle peut favoriser l’émergence de maladies infectieuses ou causer des dérèglements pouvant engendrer des catastrophes naturelles.

1. Les bienfaits de la biodiversité pour la santé

1. Les bienfaits de la biodiversité pour la santé

Pavot (Papaver), d’où est extraite la codéine © Peter Kraayvanger / Pixabay

Notre santé dépend des services et fonctions des écosystèmes dans lesquels nous vivons ou que nous exploitons . Ces services, notamment leurs effets sur la qualité de l’eau, des sols et de l’air, la nutrition, la réduction des risques de catastrophe, sont des éléments de base essentiels pour une santé durable. Certaines plantes ont la propriété d’épurer l’eau et l’air, réduire le bruit, maintenir les sols, produire de l’oxygène, capturer les polluants, etc.

Par ailleurs, la biodiversité est à la base de différentes médecines dans le monde, et de grandes découvertes dans les domaines des sciences médicales et de la pharmacologie sont issues de recherches sur la diversité des micro-organismes, de la flore et de la faune. La biodiversité est également un réservoir de molécules pharmaceutiques dont de nombreuses demeurent encore inconnues.

De nombreux médicaments ont ainsi pour origine des substances issues de plantes, de champignons, de bactéries, etc. La quinine, un antipaludéen, est par exemple extraite d’un arbuste d’Amérique du Sud appelé quinquina, la codéine a été trouvée dans le pavot, tandis qu’une molécule extraite de la Pervenche de Madagascar, la vinblastine, est utilisée dans le traitement chimiothérapeutique de nombreux cancers, mais est trop complexe pour être synthétisée en laboratoire. La phytothérapie utilise des plantes médicinales depuis des millénaires.

La biodiversité est enfin à l’origine de bénéfices non matériels, qui ont des effets positifs sur le bien-être humain. Les écosystèmes fournissent par exemple des opportunités pour le tourisme, les loisirs, l’éducation et l’inspiration. Ce patrimoine naturel peut ainsi améliorer la santé mentale. Une étude britannique a été menée sur environ 13 000 personnes, leur demandant d’être en contact avec la nature une fois par jour pendant 30 jours. Les participants se sont dits plus heureux, en meilleure santé et en connexion avec la nature.

Certains hôpitaux possèdent des jardins thérapeutiques, qui participent à l’amélioration du cadre de vie et de la concentration, à la réduction du stress, etc. La mise en évidence des bénéfices physiques, psychologiques et sociaux liés à la présence d’espaces verts en milieu urbain ont abouti à l’intégration des jardins thérapeutiques dans les recommandations du Plan Alzheimer 2008-2012.

2. Les maladies infectieuses

2. Les maladies infectieuses

De nombreuses maladies de l'Homme sont d’origine animale (domestique ou sauvage). Ces maladies dites « zoonotiques » peuvent être transmises de l’animal à l’Homme.


Les activités humaines perturbent la structure et le fonctionnement des écosystèmes. Cela entraîne la raréfaction de certaines espèces au profit d’autres, qui prennent leur place. Les interactions entre les espèces et leur environnement sont ainsi modifiées. La destruction des habitats pousse par exemple certains organismes qui n’occupent habituellement pas les mêmes milieux à se rencontrer dans les quelques zones refuges qui n’ont pas été altérées, ou à se rapprocher d’espaces anthropisés (élevage, villes, etc.) ce qui favorise l’émergence de maladies infectieuses et leur transmission.

Les maladies infectieuses sont aujourd’hui un enjeu de santé publique à l’échelle internationale, puisqu’elles présentent de multiples facultés de transmission et de dissémination tout autour du globe. Elles sont à l'origine de 14 millions de décès dans le monde chaque année.


La dengue, par exemple, est une maladie transmise par la piqûre du Moustique tigre (Aedes albopictus). Considéré comme l’espèce de moustique la plus invasive au monde, elle est originaire d’Asie du Sud-Est mais s’est diffusée vers l’Ouest, notamment via les transports de marchandises. Ce moustique est maintenant présent en Europe, notamment en France depuis 2004, et continue sa progression. Du 1er mai au 26 juin 2020, 26 cas importés de dengue ont été confirmés en France métropolitaine. Il se reproduit vite, apprécie les milieux urbains et se développe particulièrement bien dans les eaux stagnantes pauvres en biodiversité : eaux croupies dans les coupelles en rebords de fenêtre, pneus usés, milieux humides dégradés, etc. En outre, les vagues de chaleur et températures plus douces induites par le changement climatique rendent ces moustiques contagieux de plus en plus tôt.  En 2013, le coût mondial agrégé de la dengue a été estimé à 8,9 milliards de dollars.

Plus récemment, de nombreuses études scientifiques en attente de publication cherchent à établir une origine animale à la pandémie de Covid-19. Un hôte animal non identifié officiellement porteur du coronavirus Sars-Cov-2 , qui aurait joué le rôle d’intermédiaire avant transmission à l'Homme. Serge Morand, chercheur et spécialiste en écologie parasitaire, explique que la crise de la biodiversité augmente le risque d’émergence de maladies infectieuses d’origine animale.
 

La propagation des virus de la faune sauvage / Anne Van de Wiele (OFB)

visuel vidéo question de biodiversité la propagation des virus OFB

3. Les événements naturels extrêmes

3. Les événements naturels extrêmes

La France un pays particulièrement exposé
 

En France, les populations et territoires sont exposés à de nombreux événements naturels potentiellement dangereux. Le changement climatique aggrave ces événements qui peuvent former des épisodes extrêmes plus fréquents. L’urbanisation dans les zones à risques a multiplié cette exposition. L’étalement urbain se poursuivant, de plus en plus de concitoyens sont concernés.

Ces événements naturels peuvent être à l’origine de conséquences sanitaires (nombreuses victimes), psychologiques (traumatismes), environnementales (modification partielle ou totale des habitats des espèces…) et matérielles (destruction habitations, structures sanitaires et d’eau…) d’autant plus graves s’ils sont extrêmes, au point de dépasser les capacités de réaction de la société. Les deux tiers des 36 000 communes françaises sont exposées à au moins un risque naturel.

 

Enchevêtrement de macro-déchets de toutes sortes suite à la tempête de fin novembre 2014 dans le parc naturel marin du golfe du lion Jérémie Fauquet, Office français de la biodiversité

180

événements naturels dommageables entre 1900 et 2017 en France (1er pays d'Europe concerné par les catastrophes naturelles)

En savoir plus
 Changement climatique et événements météorologiques extrêmes
 

Les principaux types d’événements naturels extrêmes sont :

  • inondation et submersion marine,  
  • mouvement de terrain,  
  • avalanche,
  • feu de forêt,  
  • évènements météorologiques extrêmes (canicule ou vague de froid)
  • cyclone,
  • tempête (fort vent et beaucoup de pluie),
  • séisme,
  • éruption volcanique.

Dans les Antilles françaises, l’ouragan Irma (2017) avait causé 11 morts, 452 blessés et de nombreux dégâts matériels. Il était le plus puissant en Atlantique Nord depuis 1989.

Carte des impacts du changement climatique

Le changement climatique pourrait accroître l’intensité et la fréquence des événements météorologiques extrêmes comme les canicules ou les vagues de froid. Ces dernières décennies, le nombre de canicules a augmenté en France : il y a eu plus de canicules durant la période 2014-2016 que durant les deux décennies 1974-1993. L’augmentation du nombre de canicules et l’accroissement démographique a doublé le nombre de personnes exposées à au moins une canicule en vigilance orange entre les périodes 1974-1983 et 2004-2013.

921

canicules recensées en France métropolitaine entre 1974 et 2013, à l’origine de plus de 32 000 décès prématurés

En savoir plus
Étiage sévère dans le Haut-Doubs sur la rivière Doubs qui passe dans le lac naturel de Chaillexon formé par la retenue naturelle du Saut du Doubs Depuis 2018, ce lac s'assèche en grande partie de plus en plus souvent et de plus en plus tôt. Le trafic des vedettes touristiques et toute l'activité touristique sont fortement dégradés. Sébastien Lamy, OFB
Répercussions sur les écosystèmes
 

Dégrader les milieux naturels et en perturber le fonctionnement peut avoir des répercussions sur les événements naturels extrêmes :
 

  • Les zones humides jouent un rôle d’épuration de l’eau et de prévention face aux inondations grâce à leur capacité de rétention de l’eau. Les détruire revient à supprimer une protection face à ces catastrophes naturelles.
  • L’artificialisation des sols peut avoir des conséquences importantes quasi-irréversibles : elle rend les sols imperméables, ce qui empêche l’infiltration de l’eau dans les sols et favorise au contraire le ruissellement de l’eau, et donc l’érosion des sols et le risque d’inondation.
  • Les zones littorales, notamment les récifs coralliens, agissent comme une barrière qui atténue les cyclones et les submersions marines. Si elles sont urbanisées ou dégradées, elles ne peuvent plus jouer ce rôle.
  • Les forêts et les haies limitent les coulées de boues et les avalanches en montagne. Bien que les feux de forêts puissent être des événements naturels contribuant par exemple à diversifier les espèces,  le changement climatique et l’impact des activités humaines pourraient contribuer à augmenter leur fréquence et étendre la zone de forêts favorable aux incendies plus au nord. La "saison" des feux de brousse 2019-2020 en Australie a été particulièrement dévastatrice. L’air de certaines grandes villes australiennes a été pollué par les fumées épaisses des feux. Il est par ailleurs estimé qu’au moins un milliard d'animaux, notamment des chauves-souris et des insectes pourraient mourir à cause de la perte d'habitats et de sources de nourriture suite aux feux, en plus des millions qui ont déjà péris dans les incendies, faute de refuge ou à cause des fumées.
Les outils mis en place
 

Le Plan national canicule regroupe un système d’alerte (basé sur les prévisions météorologiques), un suivi d’indicateurs sanitaires, des actions de communication et des mesures de gestion (registres municipaux de personnes vulnérables…). Certaines villes mettent également en place des mesures pour réduire le phénomène d’îlot de chaleur urbain, notamment en renforçant la présence de la nature et de l’eau au sein des projets d’aménagement (la végétalisation apporte de la fraîcheur et de l’ombre : plantations d’arbres, verdissement des stationnements et des pourtours de bâtiments, implantation de murs végétaux et de toits verts). Un volet est en particulier dédié à mieux connaître, surveiller et évaluer les risques sanitaires induits par le changement climatique au sein du Plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC).

 

4. La qualité de l’air

4. La qualité de l’air

Les pollutions atmosphériques
 

Les activités anthropiques (transports, industries, agriculture, etc.) sont à l’origine d’émissions de gaz et de particules dans l’atmosphère. Les polluants « primaires » sont directement émis dans l’air, comme le monoxyde de carbone ou les composés organiques volatils (COV). Les polluants « secondaires » sont issus de la transformation des gaz ou particules dans l’air sous l’effet de conditions météorologiques (ozone, particules, etc.). Toutes ces substances peuvent affecter la santé si elles sont respirées (maladies pulmonaires ou cardiovasculaires).

Les mousses peuvent être utilisées pour révéler et évaluer la pollution atmosphérique par les métaux lourds. Elles ont en effet une réponse rapide face aux perturbations de leur environnement, en accumulant notamment les contaminants métalliques auxquels elles sont exposées. Elles donnent ainsi des indications sur la qualité des milieux aquatiques et terrestres.

A contrario la préservation de massifs forestiers et la plantation d’arbres en milieu urbain ont un effet bénéfique sur la qualité de l’air, d’une part en agissant comme des filtres sur la pollution, d’autre part en jouant un rôle très bénéfique dans le microclimat local ce qui permet d’atténuer les vagues de chaleur et les épisodes de pollution à l’ozone notamment.

Les pollens
 

Les grains de pollens sont essentiels au développement de la végétation. Mais ils peuvent aussi avoir des conséquences néfastes sur la santé humaine. D’après l’hypothèse « hygiéniste », un excès d’hygiène modifie le système immunitaire des enfants, en étant moins en contact avec les différentes substances naturelles, notamment les pollens et les micro-organismes (acariens par exemple). Les défenses immunitaires deviennent alors hyper-réactives face à des éléments en temps normal inoffensifs comme le pollen.

La pollution atmosphérique joue également un rôle. La présence de plantes envahissantes aggrave ce problème.


Durant les deux dernières décennies, la prévalence des allergies au pollen aurait doublé en France. Près d'un Français sur quatre souffre d'allergie respiratoire. L'augmentation de ce type d'allergie justifie la surveillance de la qualité de l'air. Les petits pollens peuvent en effet pénétrer dans les bronches et provoquer des crises d'asthme.
 

Pollen de peuplier (Populus), aussi appelé neige de mai (Nouvelle-Aquitaine) Sébastien Baillargeat / Office français de la biodiversité
Pollen de peuplier (Populus), aussi appelé neige de mai (Nouvelle-Aquitaine)
Cyprès (Cupressus), dont le pollen est très allergisant
Cyprès (Cupressus), dont le pollen est très allergisant

5. Les nuisances sonores

5. Les nuisances sonores


Les populations urbaines sont particulièrement exposées aux nuisances sonores, dues entre autres au transport et aux activités industrielles. Ces nuisances sont une menace pour la biodiversité terrestre et marine mais elles constituent également un danger direct pour la santé humaine. Au moins un million d’années de vie en bonne santé seraient ainsi  perdues chaque année en raison du bruit causé par la circulation.

Les impacts sanitaires du bruit sont de trois types :
 

  • effets auditifs (baisse de l’audition, surdité), en cas d’exposition à long terme à un niveau élevé de bruit
  • effets extra-auditifs objectifs (perturbation du sommeil, du système cardio-vasculaire, etc.)
  • effets extra-auditifs subjectifs (gêne, effets sur le comportement), résultant d’une perception individuelle.


La directive européenne relative à l’évaluation et à la gestion du bruit dans l’environnement (2002/49/CE du 25 juin 2002) prévoit la création d’une carte de bruit qui dresse un bilan de l’exposition au bruit pour les gestionnaires d’infrastructures de transport routier et ferroviaire importantes et les agglomérations de plus de 100 000 habitants.

6. L’exposition aux substances chimiques

6. L’exposition aux substances chimiques

Les substances chimiques sont à la fois invisibles et omniprésentes dans la vie quotidienne. La pollution de l’environnement par les substances chimiques est une menace pour les écosystèmes et la biodiversité mais elle menace aussi directement la santé humaine. Les milieux naturels peuvent se retrouver contaminés (air, sol, eau), ce qui pose problème pour l’eau potable et l’alimentation.

Les voies et les lieux d’exposition des populations sont diverses. L’exposition aux substances chimiques peut être ponctuelle ou chronique, directe ou indirecte.

Bien que toutes les substances ne soient pas toxiques, elles peuvent avoir des effets néfastes sur la santé (intoxications, effets sur la reproduction, malformations, etc.).


En France, quatre types de substances chimiques sont suivies de près par les pouvoirs publics et les scientifiques, mais sont également des préoccupations pour les citoyens français :  

  • les pesticides
  • les perturbateurs endocriniens
  • les métaux lourds
  • les nanoparticules.

Les sites et sols pollués font l’objet d’une politique nationale de gestion particulière car ils peuvent potentiellement contenir et/ou rejeter des polluants chimiques dans l’environnement et contaminer les populations alentours.

 

7. Les impacts des politiques de santé sur la biodiversité

7. Les impacts des politiques de santé sur la biodiversité

La Stratégie Nationale pour la Biodiversité a pour objectif de « lutter contre les substances toxiques et toutes les formes de pollution »


Le 4ème Plan National Santé Environnement (2020-2024) a notamment pour objectifs : « l’amélioration de la gestion des risques sanitaires impliquant la faune et la flore sauvages », et « une expertise collective sur les effets bénéfiques de la biodiversité pour la prévention et la lutte contre les maladies ». Il est complété par une stratégie nationale sur les perturbateurs endocriniens, les plans Ecophyto 2 et Ecoantibio, ainsi qu’un plan national de réduction des émissions de polluants atmosphériques.

Ce qu'il faut retenir ...

23 % des décès dans le monde et près du quart des pathologies chroniques peuvent être imputés à des facteurs environnementaux.

Source : lien

Votre avis nous intéresse

Comment jugez-vous naturefrance en tant que portail d'information sur les données de biodiversité ?
CAPTCHA Cette question sert à vérifier si vous êtes un visiteur humain ou non afin d'éviter les soumissions de pourriel (spam) automatisées.